Ellie Ga
La pratique d’Ellie Ga emprunte à diverses structures cognitives et narratives telles que l’essai, le documentaire scientifique ou le storytelling que l’artiste met en scène dans des installations filmiques doublées de nombreuses productions dérivées : photographies, diaporamas, vidéos, etc. Son travail est toujours le fruit d’un investissement personnel important qui engage de longues périodes d’immersion dans des contextes prégnants d’où surgit la matière nécessaire à la production. La décision de faire œuvre naît des imprévus que l’artiste sait pleinement saisir et accompagner au-delà du simple constat de leur survenance, rappelant la manière des Surréalistes. Pour Pharos, c’est le contexte extraordinairement riche des études alexandrines et de la construction du grand phare qui devient le socle d’une enquête mi-scientifique, mi-biographique avec, en arrière-plan, le mythe du dieu Thot, inventeur de l’écriture et symbole de la structuration « moderne » du savoir ; le projet se déploie au M-Museum de Louvain sous la forme de l’installation vidéo Four Thousand Blocks autour de laquelle des pièces annexes fonctionnent comme autant de « compléments d’enquête ». La performance Eureka, a Lighthouse Play, programmée au même moment au festival Playground, agit en écho à cette puissante réflexion sur la circulation des images.
Merh Licht1 est-on tenté de penser en scrutant l’itinéraire qui pousse Ellie Ga à s’intéresser à l’île de Pharos après avoir effectué un périple nordique qui l’a privée de la lumière du soleil pendant les interminables mois de la nuit arctique. Réel tropisme scientifique ou besoin de se rapprocher de ce qu’elle a pu interpréter comme un signe du destin, toujours est-il qu’au sortir de sa longue nuit septentrionale, apercevant la première lueur du monde habité sous la forme d’un faisceau lumineux en provenance d’un phare, la jeune artiste décide de se consacrer entièrement à l’étude de Pharos, site qui donna son nom au célèbre édifice dont le flamboiement pouvait être perçu jusqu’à plus de cent miles des côtes de l’actuelle Égypte, le faisant rentrer pour cette raison au nombre des sept merveilles du monde. C’est dans ce contexte très marqué symboliquement et biographiquement que s’inscrit Pharos, un projet « intégral » qui entraîne, à la suite d’une expédition scientifique de longue durée dans l’Arctique à bord d’un navire de recherche, une véritable immersion dans une ville et une civilisation, Alexandrie et l’Égypte, jusqu’alors complètement inconnues de l’artiste. Plutôt que de minimiser le caractère exceptionnel de ce signal surgi des ténèbres, Ellie Ga décide d’en faire un quasi présage et sa feuille de route pour les mois, voire les années à venir. Il entre en cela une proximité d’attitude avec les Surréalistes lorsque ces derniers s’avisaient de vouloir décrypter dans la forêt des signes l’existence d’un itinéraire caché : le désir de se laisser guider par le hasard, l’inattendu, de ne pas les refouler mais bien au contraire d’en faire un véritable vade-mecum, un rapport au monde pleinement consenti. De fait, le travail d’Ellie Ga est imprégné de cette attirance pour l’imprévu qui la guide tout au long de sa quête égyptienne —et dans ses travaux précédents— qui ne la mène nulle part ailleurs qu’à la rencontre de personnages remarquables, vivants autant que disparus : en cela l’égyptologie avec ses chercheurs, ses personnages historiques, ses divinités principales et secondaires, ses méthodes, est un terrain de jeu extraordinaire, un formidable gisement de récits, certains s’inscrivant dans le principe même des études archéologiques tandis que d’autres, en devenir, s’additionnent aux premiers et forment un magma impressionnant que l’artiste prend un plaisir certain à remuer dans tous les sens.
L’histoire de Pharos est avant tout une extraordinaire histoire de mots, prise dans un non moins extraordinaire mouvement d’absorption d’une civilisation par une autre, d’une langue par une autre. Pour ces navigateurs émérites qui faisaient régulièrement escale dans ce grand port de la Méditerranée, l’association entre territoire et souverain était quelque chose d’assez habituel puisque Pharaon désignait aussi la terre d’Égypte… Quand les Grecs s’implantèrent sur l’île, ils lui donnèrent le nom modifié de Pharos, d’après Pharaon et, quand le phare fut achevé, ce dernier conserva cette appellation métonymique qui renvoie plus à sa localisation qu’à sa fonction. Par la suite, le nom de Pharos traversa la langue grecque sans encombre pour aboutir, après son passage par le latin, aux dérivés que l’on connaît : le phare, il faro et o farol. Cette première occurrence d’une dérive étymologique a son importance, elle structure le projet de l’artiste qui cherche à montrer comment le langage, les mots, subissent, si nous ne le savions pas encore suffisamment, de multiples altérations, traductions hasardeuses, réappropriations, mais aussi abus et même contresens. Ellie Ga met ainsi en lumière l’importance des structures de pouvoir dans la constitution du langage qui vont jusqu’à s’introduire de manière intrusive dans sa signification. Ce n’est pas si étonnant, après tout, concernant la civilisation égyptienne dont l’organisation ultra « pyramidale » inventa l’ordre des scribes pour asseoir et développer le pouvoir du pharaon à travers l’ensemble de ses représentations. Le propos de l’artiste n’est pas, a priori, de faire de la linguistique appliquée, on sent cependant qu’elle prend un plaisir certain à suivre cette déviance originelle reprise en cascade jusqu’à sa dernière destination. L’exemple du dieu Thot est très révélateur : son nom est à l’origine d’une dérive langagière extraordinaire qui le fait passer de la référence au chiffre 8 —Khemenou pour les Égyptiens, repris par les Arabes pour devenir el chimia, puis alchimie, la science des transformations ésotériques— à notre moderne chimie. Fondateur de l’écriture et du langage selon le mythe, le dieu à la tête d’ibis est aussi celui du hasard, l’inventeur des dés, devenant Hermès Trismégiste chez les Grecs qui ajoutent une corde supplémentaire à son arc divin, celle du voyage. Sa figure traverse l’exposition de part en part : Four Thousand Blocks retrace sa légende sous forme d’un triptyque vidéo. Au centre se déploie le récit « principal » dont la trame sinueuse entremêle les récits qui se superposent et s’entrechoquent ; sur la gauche se devinent les mains de l’artiste en train de manipuler une photo dans un bac de révélateur, photo qui s’avère être celle de deux énormes blocs de pierre à l’entrée du port d’Alexandrie sur lesquels sont peints deux et cinq points, tels deux dés de taille démesurée (Projection Harbor, 2013) ; sur la droite à nouveau deux mains qui sélectionnent des lettrines afin de composer un texte évoquant le mythe du dieu que l’on retrouve plus loin dans l’exposition sous la forme d’une impression typographique (Pharmakon, 2012), impression sans encre qui accentue le caractère fantomatique de l’écriture. Entre l’image en devenir et le verbe qui s’estompe, le récit central a du mal à se frayer un chemin, l’allégorie du caractère illusoire du savoir s’incarne dans la figure de Thot, dieu de l’écriture et du savoir mais aussi du hasard…
La Méditerranée, creuset de civilisations s’il en est, est dominée par les Égyptiens jusqu’à l’avènement de la culture grecque dont l’un des représentants majeurs, Ptolémée, général d’Alexandre, lancera la construction du phare, trois siècles avant le début de notre ère. Le phare est une construction dont la taille et l’élévation peuvent être comparées aux plus hauts de nos gratte-ciel, il est le symbole d’une civilisation qui voit s’ouvrir l’université d’Alexandrie en même temps qu’une ère de rayonnement culturel intense. Une vingtaine de siècles plus tard, une expédition scientifique menée par l’archéologue français Jean-Yves Empereur fait une découverte de tout premier ordre, un ensemble de milliers de blocs gisant au fond de la mer, manifestement en provenance de l’ancien phare, ramenant ainsi en « pleine lumière » l’histoire de la septième merveille que les innombrables péripéties de l’histoire ajoutées à une activité sismique désastreuse ont fait disparaître des radars de l’actualité scientifique.
C’est à l’intérieur de ce contexte très dense que se déploie donc Pharos qui, comme tous les projets antérieurs de l’artiste, possède une dimension quasi scientifique l’apparentant à la forme de l’essai : pour lui, l’artiste s’est inscrite à l’université d’Alexandrie et y a poursuivi pendant plusieurs mois des études d’archéologie sous-marine. Les sommités en la matière — Jean-Yves Empereur, directeur du centre d’études alexandrines et Kamal Sadou el Saadat, directeur des antiquités — deviennent les acteurs principaux d’un récit à plusieurs voix et à multiples pistes, auxquels il faut ajouter les personnages de la mythologie égyptienne ainsi que le grand historien allemand du début du xxe siècle, Hermann Thiersch, à l’origine du regain d’intérêt pour le phare. Cette profusion d’acteurs aux profils divergents explique en partie la forme décousue d’une œuvre dont on ignore l’objectif ultime. Le trop-plein d’informations devient vite un handicap à l’édification d’une quelconque certitude, l’artiste déployant un tourbillon d’images et de documents en tous genres qui finissent par donner le vertige. Elle semble elle-même perdue quand les conclusions du chercheur, Jean-Yves Empereur, sont remises en question par le témoignage de sa proche collaboratrice ou quand, voulant mettre le récit officiel à l’épreuve du réel en effectuant ses propres plongées et s’adressant en anglais au guide qui l’accompagne au fond de la mer, elle se voit répondre en arabe (Sayed)… Ellie Ga sait parfaitement jouer de ce sentiment de désorientation, encore accentué dans la performance Eureka, a Lighthouse Play, dérivée de la même expérience égyptienne, par le jonglage savamment orchestré des transparents sur le rétroprojecteur redoublé par la scansion des documents d’archives et de ses propres films de plongée via un vidéoprojecteur. L’authenticité des vestiges est aussi remise en question : au beau milieu de la performance, nous apprenons que les fameux blocs qui font l’objet de toute l’attention de l’équipe des archéologues — et de l’artiste — sont sortis de l’eau pour être nettoyés avant d’y être replongés puis rephotographiés pour le besoin des dépliants touristiques, augmentant ainsi le trouble, pointant la dualité /duplicité des images et la lutte à la fois symbolique et prosaïque pour s’en assurer la maîtrise. Faut-il appréhender ce travail comme une réflexion sur la relativité de la connaissance ? Le mythe de Thot auquel il est fait largement allusion dans les diverses œuvres de l’exposition peut apporter un début de réponse : ce dernier qui pensait, en offrant l’écriture au roi des Égyptiens, rendre le peuple plus sage et lui apporter plus de mémoire, se voit répondre par le souverain que ce n’est pas le cadeau de la mémoire qu’il lui offre là mais bien la drogue du souvenir. Dans la bouche du directeur des antiquités d’Alexandrie dialoguant avec l’artiste dans Four Thousand Blocks, le mythe sert à justifier la prédominance de l’oralité dans la civilisation arabe ; l’argument qu’il met en avant pour appuyer sa thèse est celle de l’impossibilité de se rappeler le numéro de téléphone de sa femme, enregistré dans son smartphone, preuve s’il en est que l’écriture est l’ennemie de la mémoire. Le mythe se réécrit dès lors selon la formule : l’écriture ne nous a pas donné le cadeau de la mémoire mais le poison de l’oubli…
1 Mehr Licht ! est l’expression qu’aurait prononcée Goethe sur son lit de mort, diversement interprétée selon les commentateurs comme le regret de ce grand esprit de n’avoir pu amasser suffisamment de connaissances au cours de sa vie tandis que d’autres ne retiennent que la dimension plus prosaïque de la prière de lui ouvrir la fenêtre afin qu’il puisse contempler une dernière fois la lumière du jour.
Ellie Ga, « Pharos », M-Museum, Louvain, 14 novembre 2014-25 janvier 2015 ; Eureka, a Lighthouse Play, Festival Playground, Louvain, 13-16 novembre 2014
Vendredi 13 février 2015, à 19h, à la Fondation d’entreprise Ricard, Paris, dans le cadre de l’exposition « Silence Trompeur », Marcelline Delbecq invite Ellie Ga pour une discussion sur l’étroit lien entre documentaire et fiction dans son film 4000 blocks (2014). L’échange se poursuivra autour de la projection du film Finding Chopin : Dans l’Essex (2014) de l’artiste britannique Tris Vonna-Michell.
Ellie Ga, « Carré Octogone Cercle », Le Grand Café, Saint-Nazaire, du 28 février au 31 mai ; performance, Eureka, A Lighthouse Play : dimanche 12 avril à 15h.
« Se prendre au jeu : rêves, répétitions et autres détours (The artist is a mysterious entertainer) », performances au Frac Franche-Comté, Besançon, samedi 28 mars, de 14h à 21h, commissaire : Vanessa Desclaux, avec : Ellie Ga, Julien Bismuth, Béatrice Balcou, Dominique Petitgand, Janice Kerbel, Hannah Rickards, Allen Ruppersberg, Julien Prévieux, Agnès Geoffray.
Ellie Ga’s praxis borrows from different cognitive and narrative structures, such as the essay, the scientific documentary and storytelling, which the artist presents in filmic installations backed up by many by-products: photographs, slide shows, videos, and the like. Her work is invariably the outcome of a major personal engagement entailing lengthy periods of immersion in significant contexts from which the matter required for her output emerges. The decision to produce work issues from things unforeseen which the artist manages to grasp and go along with, beyond the mere fact of their unexpected appearance, calling to mind the manner of the Surrealists. For Pharos, it is the extraordinarily rich context of studies of Alexandria and the construction of the great lighthouse which becomes the base of a half-scientific, half-biographical investigation with, in the background, the myth of the god Thoth, inventor of writing and symbol of the “modern” organization of knowledge; the project is developed at the M-Museum in Leuven in the form of the video installation Four Thousand Blocks, around which subsidiary pieces function like so many “further investigations”. The performance Eureka, a Lighthouse Play, programmed at the same time in the Festival Playground, acts like an echo of this powerful reflection on the circulation of images.
Mehr Licht1, we are tempted to think as we peer at the itinerary that prompts Ellie Ga’s interest in the island of Pharos, after making a northerly journey during which she was starved of sunlight during those endless months of Arctic darkness. Be it a real scientific pull or a need to draw closer to what she interpreted as a sign of destiny, the fact remains that on emerging from her long northern night and seeing the first glimmer of the inhabited world in the form of a beam of light coming from a lighthouse, the young artist decided to devote herself fulltime to studying Pharos, the site which lent its name to the famous edifice whose flashing light could be seen up to more than 100 miles from the shores of present-day Egypt, which is why it became one of the seven wonders of the world. Pharos is part and parcel of this symbolically and biographically very marked context as an “integral” project which, in the wake of a long scientific expedition in the Arctic on board a research vessel, involved nothing less than an immersion in both a city and a civilization, Alexandria and Egypt, hitherto totally unknown quantities for the artist. Rather than downplaying the unusual nature of this signal rising up from the darkness, Ellie Ga decided to turn it into something almost like an omen, and make it her road map for the months not to say years to come. As such it comes close in attitude to the Surrealists when these latter realized that they wanted to decipher the existence of a hidden itinerary in the forest of signs: the desire to let themselves be guided by chance and the unexpected, and not repress those things but, quite to the contrary, turn them into nothing less than a vade mecum-like handbook, a fully consenting connection with the world. Ellie Ga’s work is in fact steeped in this attraction to the unforeseen which guides her throughout her Egyptian quest—and in her earlier works, too—which leads her nowhere else than to encounters with remarkable people, quick and dead alike: as such, Egyptology together with its researchers, its historical characters, its deities, both major and minor, and its methods is an extraordinary ballpark, a tremendous mine of narratives, some part and parcel of the very principle of archaeological studies, while others, in the making, combine with the former and form an impressive magma which the artist moves about in all directions, not without a certain pleasure.
The history of Pharos is above all else an extraordinary history of words, caught in a no less extraordinary movement involving one civilization being absorbed by another, and one language by another. For those highly skilled navigators who regularly dropped anchor in that great Mediterranean port, the association between territory and sovereign was something quite usual because Pharaoh also meant the land of Egypt…When the Greeks settled on the island, they gave it the slightly altered name of Pharos, from Pharaoh, and, when the lighthouse was completed, it kept this metonymic name which refers more to its location than to its function. The name Pharos subsequently passed unobstructed through the Greek tongue, ending up, after making its way through Latin, with the derivatives which we all know: le phare, il faro and o farol. This first occurrence of an etymologocial shift has its significance, it gives structure to the artist’s project as she tries to show how—if we were not already sufficiently aware of as much— language and words undergo many different alterations, uncertain translations and re-appropriations, as well as misuses and even misinterpretations. Ellie Ga thus sheds light on the importance of power structures in the formation of language, which even, in an intrusive manner, find their way into its meaning. This is not that surprising, after all, in relation to the Egyptian civilization, whose ultra-“pyramidal” organization invented the order of scribes to underpin and develop the pharaoh’s power by way of the set of his representations. On the face of it, the artist’s idea is not to get into applied linguistics, yet we do feel that she takes a certain pleasure in following this original deviance which cascades its way towards its final destination. The example of the god Thoth is extremely revealing: his name lies at the root of an extraordinary linguistic shift which proceeds from the reference to the figure 8—Khemenu for the Egyptians, then taken up by the Arabs to become el chimia, then alchemy, the science of esoteric transformations—right down to our modern chemistry. This ibis-headed deity, mythical founder of writing and language, is also the god of chance, the inventor of dice, becoming Hermes Trismegistus for the Greeks, who added an extra string to his divine bow, that of the voyage. His figure permeates the exhibition from one end to the other: Four Thousand Blocks retraces his legend in the form of a video triptych. In the middle we find the “principal” narrative whose meandering plot intermingles overlaid and clashing tales; on the left, we can make out the artist’s hands in the process of handling a photograph in a developing tray, a photo which turns out to be of two huge stone blocks at the entrance to the port of Alexandria, on which are painted two and five dots, like two outsized dice (Projection Harbor, 2013); on the right, two hands, once again, which are selecting letters in order to compose a text evoking the myth of the god, which we find further on in the exhibition in the form of a typographical print (Pharmakon, 2012), a print without ink which emphasizes the ghostly character of the writing. Between the image in the making and the word fading, the central narrative has trouble blazing a trail for itself, the allegory of the illusory nature of knowledge being incarnated in the figure of Thoth, god of writing and knowledge, but also of chance…
The Mediterranean, cradle of civilizations if ever there was, was dominated by the Egyptians until the arrival of Greek culture, one of whose major representatives, Ptolemy, Alexander’s general, would launch the construction of the lighthouse, three centuries before the beginning of the Christian era. The lighthouse is a construction whose size and elevation may be compared with the tallest of our skyscrapers, it was the symbol of the civilization which saw the opening of Alexandria University at the same time as it ushered in an age of intense cultural influence. More than 20 centuries later, a scientific expedition led by the French archaeologist Jean-Yves Empereur made a discovery of paramount importance: a collection of thousands of blocks lying on the sea bed, evidently coming from the old lighthouse, and thus bringing fully to light the story of the seventh wonder of the world which the countless ins and outs of history, combined with catastrophic seismic activity, had erased from the radar screens of current scientific knowledge.
So it is within this very dense context that we see the development of Pharos which, like all the artist’s earlier projects, has an almost scientific dimension likening it to the form of the essay. For her project, the artist enrolled at Alexandria University and there, for several months, embarked upon undersea archaeological studies. The leading experts in the field—Jean-Yves Empereur, director of the Centre of Alexandrian Studies, and Kamal Sadou el Saadat, director of antiquities—became the leading figures in a narrative told by several voices and taking many different paths, to whom we must add the various major figures of Egyptian mythology, as well as the great early 20th century German historian, Hermann Thiersch, responsible for renewed interest in the lighthouse. This abundance of players with their different backgrounds partly explains the loose form of a work whose ultimate aim remains unknown to us. The excess of information swiftly becomes a handicap for constructing any kind of certainty whatsoever, with the artist using a whirlwind of images and documents of every kind, which end up making us dizzy. She herself seems lost when the conclusions of the researcher, Jean-Yves Empereur, are called into question by evidence produced by his close female associate, or when, wishing to subject the official narrative to the test of reality by carrying out his own dives and talking in English to the guide swimming with him to the seabed, the answer comes in Arabic (Sayed)… Ellie Ga knows only too well how to play with this feeling of disorientation, again emphasized in the performance Eureka, a Lighthouse Play, stemming from the same Egyptian experience. In a shrewdly orchestrated way she juggles with the transparencies on the overhead projector, compounded by the scansion of archival documents and her own diving films by way of a video projector. The authenticity of the remains is also called into question: slap bang in the middle of the performance, we learn that the famous blocks which monopolize all the attention of the team of archaeologists—and of the artist herself—are removed from the water in order to be cleaned before being dropped back into the sea and then re-photographed to meet the needs of tourist brochures, thus adding to the confusion, by pinpointing the duality/duplicity of the images and the at once symbolic and prosaic struggle to ensure control of them. Should we understand this work as a way of thinking about the relativity of knowledge? The myth of Thoth, which is much referred to in the various works in the exhibition, may offer an embryonic answer: the sovereign’s answer to this deity, who thought that by offering writing to the king of the Egyptians, he would make the people wiser and offer it more memory, was that it was not the gift of memory that he was offering them, but rather the drug of remembrance. In the mouth of the director of antiquities of Alexandria, talking with the artist in Four Thousand Blocks, the myth is used to explain the predominance of the oral tradition in Arab civilization; the argument which he puts forward to underpin his thesis is that of the impossibility of remembering his wife’s telephone number, entered in his smartphone, proof, if need there were, that writing is the enemy of memory. The myth is henceforth rewritten using the words: Writing has not given us the gift of remembering but the poison of forgetting…
1-Mehr Licht! [More light!] are the words allegedly uttered by Goethe on his death bed, variously interpreted by different commentators as that great mind’s regret that he had not been able to amass enough knowledge during his lifetime, while others go along with the more prosaic dimension of asking someone to open the window for him so that he might have a last look at the daylight.
Ellie Ga, « Pharos », M-Museum, Leuven (Belgium), 14 November 2014-25 January 2015 ; Eureka, a Lighthouse Play, Playground Festival, Leuven, 13-16 November 2014
On Friday February 13, 7 pm, at Fondation d’entreprise Ricard, Paris, Marcelline Delbecq invites Ellie Ga to talk about her film 4000 blocks (2014).
Ellie Ga, « Carré Octogone Cercle », Le Grand Café, Saint-Nazaire (France), February 28-May 31 2015 ; Eureka, A Lighthouse Play on Sunday April 12, 3 pm.
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- Du même auteur : Jack Warne, Yan Tomaszewski, Alun Williams, Ben Thorp Brown, Mircea Cantor,
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