[Écritures documentaires] Préambule

par Mathilde Villeneuve

Proposer quelques clés de lecture d’une scène artistique qui nous semblait renouveler son « approche du réel » en naviguant aux frontières du cinéma documentaire, de l’art et de la fiction, tels ont été les enjeux de ce dossier. La tâche s’est avérée délicate, tant les productions se forgent à l’intérieur même du croisement des disciplines, au point d’en refuser la question. Nous avons souhaité mettre l’accent sur des artistes engagés dans l’élaboration d’un discours historique, social et politique qui redonne ses pleins pouvoirs à l’image et se dégage de toute forme d’injonction inhérente à la production d’un « message », soit par la production d’« images de terrain » très conscientes du dispositif audiovisuel que les artistes manipulent en vue de faire apparaître des espaces invisibles et inaudibles et de leur conférer une place au sein d’un monde « hypervisible », soit en jouant des codes admis du documentaire pour reconstituer de toutes pièces une réalité qui n’en est pas moins vraie. Par touches, nous éclairons ces premières analyses par des focus sur des pièces récentes, qui ouvrent de nouveaux points de fuite. Nous proposons également une mise en perspective à travers les précieux témoignages de ces acteurs qui, par la mise en place de dispositifs critiques, de production et de diffusion, travaillent à donner à ces œuvres une place ad hoc : Jean-Pierre Rehm, le directeur du festival de film documentaire de Marseille ; le Silo, collectif dédié aux images en mouvement, ou encore Mo Gourmelon, co-directrice de l’Espace Croisé à Roubaix. Enfin, deux textes monographiques permettront de s’attarder sur l’œuvre de deux artistes en particulier : Jean-Charles Hue et Zineb Sedira, à partir du travail de laquelle le critique d’art Morad Montazami articule une analyse fine du traitement de l’archive.

Mathilde Villeneuve