Les chemins de l’émergence II : Les écoles
Dans le numéro précédent nous évoquions le rôle des salons dans ce que nous pourrions considérer comme une chaîne où une filière destinée à faire émerger le jeune artiste sur le devant de la scène. Selon que l’on emploie le mot chaîne ou le mot filière, les conséquences symboliques ne sont pas les mêmes : parler de chaîne renvoie à l’existence de multiples maillons dont la solidité finale est censée reposer sur le plus faible de ses composants mais suppose aussi l’existence d’une solidarité et d’une communauté d’intérêt ; parler de filière renvoie à un paradigme industriel et commercial qui ne peut suffire à décrire un processus comme celui de l’émergence qui obéit à d’autres considérations, même si la dimension pragmatique ne peut plus être ignorée. La place des écoles d’art, petites ou grandes, dans ce schéma de maturation et d’acquisition d’un vocabulaire plastique propre, est fondamentale : c’est pendant ces cinq à six années d’études, voire plus dans le cas d’un post diplôme ou de son équivalent, que se finalisera une forme artistique destinée à produire ses effets dans le monde de l’après-école.
Dans le « combat » que mènent les grandes écoles, mais aussi les plus modestes, afin de pourvoir leurs étudiants de tous les attributs nécessaires à un lancement réussi dans la nébuleuse de la « professionnalisation », se développent un certain nombre de stratégies destinées à attirer les meilleurs éléments : résidences internationales, revues, workshops, post-diplômes, prix, participation à des salons, invitations de professeurs vedettes… Rien n’est négligé, chacun multiplie les offres, peaufine son coefficient d’attraction afin de se parer des plus beaux atours dans ce qui peut apparaître à distance comme une âpre concurrence. Le modèle de référence semble bien plus celui de l’école de commerce que de celui de l’école à l’ancienne, avec son joyeux désordre, ses divagations en tout genre et son empathie pour le temps perdu… C’est que l’école ne doit plus se contenter de former des artistes, elle doit aussi réussir à produire des références internationales : traumatisés par la surprésence des artistes d’outre-Rhin, d’outre-Atlantique et d’outre-Manche sur les scènes artistiques du monde entier, les directeurs de nos petites et grandes écoles semblent vouloir mettre le turbo pour rattraper tout ce temps perdu et se rapprocher du modèle des fabriques de stars que sont la Central Saint Martins de Londres, la HEAD de Genève ou encore la Staatliche Kunstakademie de Düsseldorf…
Éléments de langage
Ici il faut déjà ouvrir une courte parenthèse qui mériterait d’ailleurs un plus long développement s’il ne risquait de déborder le cadre de cette courte étude : les écoles d’art professionnalisent ! En effet, si l’on compare les pourcentages de réussite à la sortie des écoles d’art à ceux de certaines universités, les écoles n’ont pas à rougir. Comme le rappelle à juste titre Emmanuel Tibloux, directeur de l’ENSBA Lyon, citant les statistiques issues d’une enquête réalisée en 2006 par le Ministère de la Culture et mises à jour depuis : « 80% des diplômés trouvent un emploi en lien avec leur formation dans les trois ans qui suivent leur sortie de l’école. Si 10% deviennent artistes, les autres 90% exercent et tirent leurs revenus d’activités ayant un lien direct avec la création. Webdesigner, graphiste, photographe, iconographe, chargé de production, régisseur, réalisateur, designer, commissaire d’exposition, directeur artistique, sont quelques exemples des métiers qu’ils occupent. […] Sur de nombreux territoires, ils portent des projets artistiques d’envergure : festivals, résidences, lieux d’expositions. Ils ont ainsi très largement contribué à la professionnalisation du secteur des arts visuels au cours des vingt dernières années. » La souplesse de la formation, l’ouverture d’esprit, la possibilité donnée de s’intéresser à de nombreuses disciplines annexes dans le cadre d’études poussant plus à la curiosité qu’à la performance, font que la grande majorité des anciens étudiants des écoles trouve facilement du travail avec seulement un DNAP en poche, faisant mentir la réputation tenace de filière de second choix qui colle encore aux basques de l’enseignement des beaux-arts… Aussi nous tenons bien à distinguer ce qui relève d’une insertion professionnelle du « devenir artiste » : ces précautions linguistiques sont destinées à cerner le champ d’une analyse qui concerne plus précisément l’émergence des futurs artistes à la sortie des écoles ; ce qui ne manque pas d’interroger au passage les finalités d’un enseignement censé se focaliser sur une élite restreinte de 5 à 10% des effectifs – si l’on retient comme critère d’émergence l’exposition dans un centre d’art ou l’entrée dans une galerie privée – tandis que les 90 % restants réussissent sans faire de vague à trouver des débouchés…
Nous n’entrerons pas dans ce débat : nous interrogeons ici les stratégies destinées à l’émergence des jeunes artistes à la sortie des écoles, considérant que ces dernières bénéficient quoi qu’il arrive à l’ensemble de la population estudiantine. Depuis une quinzaine d’années (difficile de donner un chiffre précis), les écoles d’art françaises se sont dotées de dispositifs avancés destinés à faire entrer de plain-pied le futur artiste dans la réalité du monde extérieur : la majorité des directeurs d’écoles a conscience du fait que, plus tôt l’étudiant se retrouvera face aux obstacles de tous ordres qu’il aura à surmonter par la suite, meilleures seront ses chances d’évoluer avec aisance dans un milieu difficile à décrypter. Cette propension qui frise parfois l’obsession reflète une vraie réalité qui est celle de la difficulté à se frayer un chemin à travers le dédale des sentiers de l’émergence. Il existe bien entendu des degrés divers et une polarisation nette entre ce ce que l’on pourrait appeler des dispositifs « domestiques », c’est-à-dire des mesures tendant à se rapprocher d’un extérieur proche, et des projections plus « lointaines » vers les pays étrangers non européens, par exemple, étant supposé que les voyages ne se contentent pas de former la jeunesse mais l’enrichissent aussi fortement sur le plan de l’inspiration.
Pratiques domestiques et exils distants
Il n’est pas toujours nécessaire d’aller se former au loin pour acquérir des réflexes et commencer à se constituer de solides attaches dans le monde extérieur. Grâce à la densification très forte du réseau de l’art contemporain en France ces deux dernières décennies, il devient facile pour les étudiants de se retrouver intégrés dans les nombreuses structures associatives ou autres qui jalonnent le territoire hexagonal : dans des villes comme Bordeaux ou Nice, il existe au moins une ou deux galeries associatives d’importance, un centre d’art, un musée voire un FRAC avec qui nouer des liens prometteurs. Pour Pierre-Jean Galdin, directeur de l’école de Nantes, il est indispensable de créer une « agrafe », c’est-à-dire d’ancrer très fortement le futur artiste dans ce réseau dense de structures proches qu’il est déjà supposé côtoyer naturellement : il est aussi nécessaire par ailleurs, toujours selon Pierre-Jean Galdin de s’arrimer à un réseau local connecté à la place parisienne, place qui, pour lui, reste incontournable dans l’hypothèse d’une véritable émergence. Dans cette logique, chaque école développe ses recettes propres en fonction d’un contexte local considéré comme suffisamment porteur. Ainsi Yves Robert à Toulouse, où il vient d’être nommé, va certainement perpétuer la politique de participation des étudiants au Printemps de Septembre (comme à la performance de Joris Lacoste pour l’édition 2010). Emmanuel Tibloux, quant à lui, hérite d’une véritable batterie de réponses mise en place par ses prédécesseurs : l’invitation faite aux diplômés à participer à l’exposition annuelle « Les enfants du sabbat » au Creux de l’enfer ; « Rendez-vous », exposition réunissant des jeunes artistes issus de l’école à l’Institut d’art Contemporain pendant la biennale de Lyon ou encore « Galeries Nomades » qui propose aux jeunes diplômés des écoles de Rhône-Alpes d’exposer dans des centres d’art de la région, etc.). Le post-diplôme de 2e ou 3e génération que vient de lancer Fabrice Hyber pour l’école des beaux-arts de Nantes participe de cette volonté de créer des passerelles entre des mondes a priori irréconciliables, celui de l’art et celui de l’entreprise, amenés à se retrouver dans une vision renouvelée de la production des œuvres au sein d’un nouveau type de mécénat… Les projets prolifèrent qui tentent à chaque fois de mettre en exergue les domaines d’excellence des contextes locaux : ainsi Danièle Yvergniaux, directrice de l’école de Quimper, est en train de mettre en place avec la plate-forme Document D’artistes Bretagne un site internet spécifiquement destiné aux jeunes artistes issus des quatre sites des écoles d’art de Bretagne ; Nicolas Bourriaud, directeur de l’ENSBA Paris, s’apprête à renouer avec la tradition de récolter des dons de jeunes artistes en vue de constituer une collection itinérante, avec en prime la nomination d’une curatrice à plein temps chargée de promouvoir et de faire voyager cette collection : avec l’exposition annuelle des félicités sur le site même de l’école des beaux-arts, le nouveau directeur souhaite donc, selon ses dires, devenir le premier « agent » de ses étudiants…
Pour tous ces directeurs que nous avons interrogé, il ne fait cependant aucun doute qu’un exil momentané vers des destinations lointaines soit le passage obligé de l’acquisition de la qualité de jeune artiste, tant est-il que ces éloignements ne doivent pas non plus se départir d’un solide pragmatisme. Ce qui a fondamentalement évolué au cours des dernières décennies, c’est la normalisation du phénomène Erasmus : alors que pour les générations précédentes la résidence dans un pays périphérique de l’Europe passait pour une aventure extrême, désormais, l’échange dans le cadre d’Erasmus, tout en conservant un attrait certain du fait du changement momentané de cadre de vie et de contexte lexical, se banalise du fait même du « rapetissement » de l’Europe et de la facilitation des déplacements intérieurs. Pour une école comme Quimper, une des plus excentrées, le développement des échanges internationaux a toujours été une priorité, « avant même Erasmus, selon sa directrice, pour contrebalancer l’isolement de l’école », mais aussi pour « favoriser l’insertion car ils obligent l’étudiant à s’adapter à un nouveau contexte, enrichissent ses connaissances et sa culture, et développent une ouverture et une curiosité ». Pierre-Jean Galdin ne contredira pas cette assertion, lui qui a mis en route il y a deux ans déjà la résidence Fieldwork : Marfa destinée à accueillir six jeunes artistes ainsi que des étudiants de master au sein d’un programme commun de recherche sur le paysage et la frontière avec la HEAD de Genève, dans cette petite ville du Texas qui est aussi le siège de la fondation Chinati de Donald Judd ; il s’agit d’acquérir une dimension internationale en comptant sur l’effet de levier qualitatif et attractif que l’association avec une école aussi réputée à l’international est capable de susciter. La facilitation des échanges internationaux, dans et hors dispositif Erasmus, leur intégration dans la plupart des programmes des écoles d’art françaises, témoignent d’une prise de conscience assez nette que l’émergence passe par la construction d’une dimension internationale des dispositifs. Mais cela pose la question de l’homogénéité de la fameuse chaîne que l’on évoquait en introduction : si l’on est de plus en plus exigeant avec ce jeune artiste déjà censé se débrouiller parfaitement à l’étranger et posséder un solide réseau avant d’entrer dans le monde « réel », qu’en est-il de ses futurs interlocuteurs ? Y a-t-il en face de lui une offre capable de répondre à des demandes de plus en plus pressantes ? Y a-t-il suffisamment de galeries privées susceptibles d’absorber cet afflux massif de jeunes artistes sur le marché de l’art français ?
Néo post-diplômes
À la fin des années quatre-vingt dix, il semblait assez évident que le sésame absolu de l’émergence pour le jeune artiste était le post-diplôme. Résidence de longue durée associée à une bourse conséquente, mise à disposition des équipements de l’école, recrutement de directeurs reconnus, complicité des structures locales, savant dosage d’artistes étrangers garantissant le label international, tous ces ingrédients semblaient suffire à garantir le succès de ces microstructures sises dans le giron des écoles mères… Aujourd’hui, le modèle du post-diplôme version nineties semble souffrir d’un vieillissement précoce qui le force à se repenser radicalement. Il est désormais difficile pour une école de supporter intégralement le coût de la structure et pour un jeune artiste de survivre avec une bourse souvent modeste dans des métropoles où le prix des loyers tend à se rapprocher dangereusement de celui des capitales ; au-delà de l’aspect financier, c’est aussi un fonctionnement de plus en plus inadapté qui est proposé à de jeunes artistes de plus en plus nomades. Pourtant, l’idée de base du post-diplôme qui est de réunir de jeunes artistes d’horizons multiples dans le but de créer, le temps d’une résidence partagée, un projet commun, semble toujours valide. Les nouveaux modèles semblent plus adaptés à ces nouvelles donnes de l’émergence et semblent également vouloir répondre à des demandes plus orientées vers la perpétuation de conditions de production préférentielles ou encore la conservation d’un climat d’échange intellectuel associé à la mise en relation avec le marché de l’art. Les deux exemples nantais dont nous venons de parler s’inscrivent dans le droit fil d’une revisitation de structures lourdes en proposant, pour Marfa, des résidences raccourcies qui délocalisent le post-diplôme et mutualisent le coût avec une école étrangère, quand le système proposé par Fabrice Hyber permet de répartir ces mêmes coûts sur l’extérieur tout en anticipant des potentialités de mécénat mais aussi nombre d’intéressements de la part des entreprises. Le dispositif qui vient d’être mis en place à l’école de Lyon semble aussi s’inscrire dans cette dynamique de reconstruction des post-diplômes : Emmanuel Tibloux parle d’une « sixième année, non diplômante, sur projet professionnel, conçue comme une période de transition entre la fin des études et l’entrée dans la vie professionnelle. » Ceci est d’autant plus remarquable que ce dispositif se superpose à celui du « vrai » post-diplôme de l’école, toujours en fonctionnement.
Des stratégies dispersées et un retour aux fondamentaux
Le petit questionnaire que nous avons adressé à ces directeurs d’école d’art comportait une entrée relative aux projets collectifs pour faciliter l’émergence des jeunes artistes : les réponses montrent à l’évidence qu’il n’existe pas de stratégie concertée à l’échelle nationale qui pourrait avoir un retentissement international alors que ces mêmes directeurs s’accordent à dire que cette dimension est désormais leur priorité… Il semble que la plupart d’entre eux préfère jouer en solitaire ou même s’associer avec des écoles étrangères comme le fait l’école de Nantes. C’est le signe qu’il existe une concurrence réelle entre toutes ces écoles sur le plan de l’émergence mais, après tout, une concurrence n’est pas mauvaise quand elle n’est pas déloyale. Un autre enseignement à tirer de ces réponses est la place centrale accordée à l’enseignant artiste duquel, plus que jamais, on attend qu’il fasse bénéficier les étudiants de son savoir-faire, de son expérience et de ses multiples réseaux pour leur faire franchir l’impitoyable seuil de la reconnaissance : « Énergie : Oui ! Qualité : Non ! » le projet mené par Thomas Hirschorn à l’ENSBA Paris de construitre un « scénario d’interventions diverses impliquant des moments d’exposition, d’enseignement, de programmation et de prise de parole en public » en semble la plus parfaite illustration. Car, « placer l’artiste et l’œuvre au centre, cela me semble être ça, l’ADN des Beaux-arts… » conclut Nicolas Bourriaud.
The Paths of Emergence. II: Schools
In our previous issue, we talked about the role of “salons” in what we might regard to be a chain or a path designed to bring young artists to the forefront of the art scene. Depending on whether we use the word chain or path, the consequences—which are symbolic—are not the same; talking about chain refers to the existence of many different links whose eventual solidity is meant to be based on the weakest of its components, but also presupposes the existence of a solidarity factor and a community of interests; talking about path refers to an industrial and commercial paradigm which cannot sufficiently describe a process such as that of emergence, which complies with other considerations, even if the pragmatic dimension cannot be ignored. The place of art schools, large and small, in this scheme involving the development and acquisition of a particular visual vocabulary, is quintessential: it is during these five to six years of studies, and even more in the case of a postgraduate degree or its equivalent, that an artistic form, bound to have its effects in the post-school world, will be finalized.
In the “struggle” in which major schools, but also more modest ones, are engaged, in order to provide their students with all the skills necessary for a successful launch into the nebula of “professionalization”, a certain number of strategies are being developed, strategies designed to attract the best elements: international residencies, magazines, workshops, postgraduate degrees, prizes, participation in “salons” and similar art shows, and invitations to star professors, nothing is overlooked, everyone is increasing the number of offers and refining the coefficient of attraction in order to deck themselves out with the most beautiful finery in what may appear, from a distance, to be fierce competition. The reference model seems to be much more that of the business school than of the old-style school, with its merry disorder, its ramblings of every kind and its empathy for time wasted… The fact is that the school must no longer be content with training artists, it must also manage to produce international references: traumatized by the excessive presence of artists from Germany, England, and USA in art scenes all over the world, the directors of our schools, large and small, seem bent on going into overdrive to make up for all that wasted time and get closer to that model of star factories represented by Central Saint Martin’s in London, the HEAD in Geneva and the Staatliche Kunstakademie in Düsseldorf…
Elements of Language
Here we must already introduce a short parenthesis which would incidentally merit a longer treatment, if it did not risk going way beyond the brief of this short study: art schools are professionalizing! In fact, if we compare the percentages of success when students leave art schools with those of certain universities, the art schools have nothing to be ashamed of. As we are rightly reminded by Emmanuel Tibloux, director of the Lyon ENSBA (Advanced School of Fine Arts), quoting statistics coming from a survey carried out in 2006 by the Ministry of Culture and since updated: “80% of graduates find a job linked with their training in the three years after they leave school. If 10% become artists, the other 90% become involved in and derive their livelihood from activities with a direct link to art. Web designers, graphic artists, photographers, illustrators, production managers, foremen, directors, designers, exhibition curators, and artistic directors are just some examples of the professions they go into. […] In many areas they are involved in major art projects: festivals, residencies, exhibition venues. They have thus made a very considerable contribution to the professionalization of the visual arts sector over the past 20 years”. Flexible training and education, open-mindedness, and the possibility offered of becoming involved in many subsidiary disciplines in the framework of studies, prompting curiosity over performance, mean that the great majority of former students form art schools easily find work with just a DNAP (basic arts degree) under their belt, belieing the stubborn reputation of being a second choice path, which still clings to the coattails of fine arts teaching… So we are at pains to single out what results from a professional integration involving “becoming an artist”: these linguistic precautions are designed to define the arena of an analysis which more precisely concerns the emergence of future artists when they leave their art schools; which still calls into question, in passing, the end purposes of an instruction meant to focus on a small elite of 5 to 10% of the student body—if we use as a criterion of emergence an exhibition in an art centre or admission into a private gallery—while the remaining 90% succeed without making much ado about finding outlets…
We will not get involved in this debate: here we are questioning the strategies aimed at the emergence of young artists when they leave their art school, considering that these strategies derive some benefit, no matter what happens, for the whole of the student population. For the past 15 years or so (it is hard to give a more precise figure), French art schools have been endowed with advanced systems designed to give future artists a solid entry into the reality of the outside world: most art school directors are aware of the fact that, the sooner the student faces all the different obstacles he will have to surmount in his future life, the better his chances of evolving easily in an environment that is hard to decipher. This propensity, which at times verges on obsession, reflects an actual reality which is that of the difficulty of blazing a trail for yourself through the labyrinth of the paths of emergence. There are of course different degrees, and a clearly defined polarization between what we might call “domestic” arrangements, i.e., measures tending to involve a nearby exterior, and more “distant” projections towards non-European foreign countries, for example, on the supposition that journeys are not limited to educating youth, but also greatly enrich young people where inspiration is concerned.
Domestic Practices and Distant Exiles
It is not always necessary to go far away to be educated in order to acquire reflexes and begin to put together solid moorings in the outside world. Because of the very high densification of the contemporary art network in France over these past two decades, it has become easy for students to find themselves included in many associative structures, and other organizations which stake out France’s national territory: in cities like Bordeaux and Nice, there are at least one or two important associative galleries, an art centre, a museum and even a FRAC (Regional Contemporary Art Fund) with which to weave promising contacts. For Pierre-Jean Galdin, director of the Nantes Art School, it is vital to create a “hook” which is to say, something for anchoring the future artist very stoutly in this dense network of similar structures which he is already supposed to rub shoulders with quite naturally: it is also necessary, furthermore, again according to Pierre-Jean Galdin, to become attached to a local network connected to the Parisian forum, a forum which, for him, remains a must in the hypothesis of any real emergence. In this logic, each school develops its own formulae based on a local setting regarded as sufficiently promising. So Yves Robert in Toulouse, where he has just been appointed, will undoubtedly perpetuate the policy of participation for his students in “Le Printemps de Septembre” (like in Joris Lacoste’s performance for the 2010 festival). Emmanuel Tibloux, for his part, has inherited a veritable battery of responses introduced by his predecessors: the invitation offered to graduates to take part in the annual exhibition Les enfants du sabbat at Le Creux de l’enfer, Rendez-vous, an exhibition bringing together young artists from the school at the Institut d’art contemporain during the Lyon Biennale, and Galeries Nomades, which offers young graduates from Rhône-Alpes art schools a chance to exhibit in art centres in the region, etc. The second or third generation postgraduate degree which Fabrice Hyber has just launched for the Nantes School of Fine Arts is part and parcel of this desire to create bridges between worlds which, on the face of it, are incompatible, the world of art, and the world of business now finding themselves with a renewed vision of the production of works within a new type of patronage… There is a proliferation of projects which, in each instance, are trying to highlight areas of excellence in local contexts: so, with the platform Document d’Artistes Bretagne, Danièle Yvergniaux, director of the Quimper Art School, is in the process of introducing a website specifically aimed at young artists coming from the four sites of the European Graduate School of Art in Brittany; Nicolas Bourriaud, director of the ENSBA, Paris, is preparing to link back up with the tradition of collecting donations from young artists with a view to forming a travelling collection, with, as a bonus, the appointment of a full-time curator responsible for promoting this collection and getting it on the road, so to speak: with the annual exhibition of highly commended works on the actual school of fine arts site, the new director thus wishes, by his own admission, to become the primary “agent” for his students…
For all these directors whom we have questioned, there is however no doubt that a temporary exile towards distant destinations is the obligatory passage whereby the young artist acquires quality, even though it is a fact that these distant travels must also veer away from solid pragmatism. What has basically evolved over the last few decades is the standardization of the Erasmus phenomenon: whereas for earlier generations residence in an outlying European country passed for an extreme adventure, henceforth, exchanges within the Erasmus framework, while retaining a certain attraction, simply because of the temporary change of living environment and linguistic context, are becoming commonplace due to the very fact of Europe’s “shrinkage”, and the ease of movement within Europe. For a school like Quimper, which is in one of the most out of the way places, developing international exchanges has always been a priority “even before Erasmus, to compensate for the school’s isolated situation”, according to its director, but also “to encourage integration because it forces the student to adapt to a new context, enriching the student’s knowledge and culture, and developing openness and curiosity”. Pierre-Jean Galdin will not contradict this assertion, for it was he who introduced, two years ago now, the Fieldwork: Marfa residency, designed to accommodate six young artists as well as Master’s students within a shared research programme to do with landscape and frontier, conducted with the HEAD, in this small town in Texas, which is also the headquarters of Donald Judd’s Chinati Foundation; it is a question of acquiring an international dimension by anticipating the qualitative and attractive fulcrum effect which association with such an internationally renowned school is capable of giving rise to. The facilitation of international exchanges, inside and outside the Erasmus system, and their integration in most French art school programmes, attests to a fairly clear cut awareness that emergence proceeds by way of the construction of an international dimension in systems.
But by the same token, this raises the issue of the homogeneity of the famous chain which we mentioned in our introduction: if we are more and more demanding with this young artist who is already supposed to manage perfectly well on his own abroad, and have a solid network before entering the “real” world, where do things stand with his future interlocutors? Does he face an offer capable of responding to ever more pressing demands? Are there enough private galleries capable of absorbing this massive influx of young artists appearing on the French art market?
Neo-Postgraduate Degrees
At the end of the 1990s, it seemed quite obvious that the absolute key for the emergence of a young artist was the postgraduate degree. Long-term residency associated with a sizeable grant, friendly and helpful entourage in the host school, recruitment of recognized directors, complicity of local organizations, and a shrewd dose of foreign artists guaranteeing the international label, all these ingredients seemed enough to guarantee the success of these micro-structures located within mother schools… Nowadays, the model of the 1990s’ version postgraduate degree seems to be suffering from early ageing, which is forcing it to have radical second thoughts. It is henceforth difficult for a school to completely bear the cost of the structure and for a young artist to survive with an often modest grant in major cities where the price of rents is coming dangerously close to those paid in capitals; over and above the financial aspect, what is being proposed to ever more nomadic artists is an increasingly unsuitable way of working. However, the basic idea of the postgraduate degree, which is to bring together young artists from many different backgrounds with the goal of creating a shared project for the duration of a shared residency, still seems valid. The new models seem better adapted to these new deals of emergence and also seem to want to meet demands more oriented towards the perpetuation of preferential conditions of production, or the conservation of an intellectual climate of exchange associated with liaisons with the art market. The two examples in Nantes, which we have just described, are directly part and parcel of a re-visitation of cumbersome structures, insomuch as they propose, for Marfa, shorter residencies which shift the location of the postgraduate degree and share the cost with a foreign school, when the system proposed by Fabrice Hyber makes it possible to distribute these same costs externally, while anticipating the potential patronage on the part of businesses. The system which has just been introduced in the Lyon art school also seems to be part of this dynamic for reconstructing postgraduate degrees: Emmanuel Tibloux is talking about a “sixth year, not counting towards a degree, based on a professional project, conceived as a period of transition between the end of studies and the beginning of professional life”. This is all the more noteworthy because this system is overlaid on the system of the school’s “real” postgraduate course, which is still operative.
Dispersed Strategies and a Return to Basics
The short questionnaire which we sent to these art school directors included an item relating to collective projects in order to help the emergence of young artists: the answers clearly show that there is no concerted strategy on a national scale which might have international repercussions, while these same directors are agreed in saying that this dimension is henceforth their priority… It would seem that most of them prefer to go it alone, or even associate with foreign schools, the way the Nantes art school is doing. This indicates that there is a real rivalry between all these schools on the level of emergence but, after all, competition is not bad when it is not unfair. Another lesson to be drawn from these answers is the central place given to the artist-teacher who, more than ever, is expected to offer his students the benefit of his own know-how, his experience, and his many networks, in order to help them negotiate the pitiless threshold of recognition: “Energy: Yes! Quality: No!”, the project undertaken by Thomas Hirschhorn at the ENSBA Paris, to construct a “scenario of different interventions involving moments of exhibition, teaching, programming and public speaking”, seems to be the most perfect illustration of this. Because, Nicolas Bourriaud concludes, “Putting the artist and the work at the hub of things, that seems to me to be the DNA of fine arts schools…”.
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