Guyton\Walker
Le travail de Guyton\Walker paraît être au premier coup d’œil une accumulation hétéroclite et désordonnée de toutes sortes de choses – des pots de peinture aux étiquettes évoquant des boîtes de conserves de salades de fruits pour des collectivités, des tableaux plus ou moins abstraits ou bien reproduisant des publicités superposées les unes aux autres dans des compositions anarchiques, des panneaux de placoplâtre sérigraphiés de motifs Op, des étagères, des caisses… Les tableaux sont eux-mêmes des accumulations d’images tirées de magazines, et/ou réemployées d’autres tableaux précédents. Toutes les images et les motifs sont recyclés, passés du monde à l’art et vice versa, mais aussi, comme une allégorie de cette circulation, en passant d’un support à l’autre, boîte en fer, tableau ou écran de sérigraphie. Les images des tableaux sont successivement (et dans le désordre) déchirées, photocopiées, scannées, surimprimées, sérigraphiées. Saturés et épaissis par l’empilement des couches successives, les tableaux paraissent usés, en bout de course, comme par anticipation de leur propre mise au rebut, ou comme pour dissuader par avance toute velléité de réemploi. Les couches de peinture et d’encre y sont superposées comme s’il s’agissait de calques dans Photoshop, l’un des outils effectivement utilisés pour leur fabrication. Les tableaux acquièrent au final une certaine épaisseur, ils ont presque un aspect « painterly ». Il faudrait employer un néologisme – quelque chose comme « computerly » – pour désigner cet aspect conservant la trace des différentes manipulations informatiques par calques et couches, après la décision prise d’aplatir l’image.
L’usage que font Guyton\Walker de ces outils (aussi bien de l’outil informatique que de ceux à la disposition des peintres) est surtout une succession de mésusages et d’accidents. En mettant en avant les moyens de leur art, en l’occurrence l’outil informatique, leur travail s’oppose à un usage qu’on peut qualifier (comme le fait Wade Guyton) d’« illusionniste » (autrement dit destiné à le faire disparaître) du même outil, avec la haute définition, le rendu lisse, etc. Les scanners utilisés par les deux artistes sont d’authentiques habitants deFlatland. Tout ce qui dépasse ne serait-ce que d’un centimètre la surface du plateau disparaît dans le noir complet (c’est la raison pour laquelle les fonds de Guyton\Walker sont noirs : en laissant le capot du scanner ouvert pour ne pas écraser les fruits, ils doivent se passer du cache blanc au revers du capot qui donne normalement le blanc du fond). Le scanner perçoit réellement le monde comme étant en deux dimensions. Le monde au-delà est une chambre noire. Certains des motifs utilisés par Guyton\Walker semblent l’être en fonction de cette limitation de la profondeur : des fruits découpés en rondelles, des pages de magazines… Toutes ces slices of real, tout cela se retrouve en définitive « aplati » sur la surface des tableaux. Les reproductions de couteaux auprès de fruits en rondelles (poires, pommes, bananes, kiwis, noix de coco, citrons…) suggèrent une analogie avec un autre procédé de transformation, la cuisine – le scanner à plat servant de planche de travail. Parfois les objets scannés sont trop volumineux, comme les pots de peinture, de telle sorte qu’ils sont rendus comme des photos bougées, ou plus exactement une image sur une feuille qu’on aurait tirée de force d’un photocopieur ou d’une imprimante. À l’origine, Guyton et Walker se servaient de ces pots de peinture comme supports aux tableaux en train de sécher dans leur atelier. Les étiquettes collées dessus ont été réalisées a posteriori, à partir d’images de tranches de fruits scannées, comme pour faire correspondre l’aspect de ces pots avec celle de boîtes de fruits au sirop auxquelles elles ressemblaient. La présentation des différents éléments suggère souvent que le contenu de la boîte a pu donner naissance au sujet du tableau. L’image promet un « contenu », et cette promesse est plausible, au sens où la peinture contenue dans les pots peut vraiment servir à réaliser une image de ces fruits. Par exemple, un tableau figurant une noix de coco en coupe est supporté par deux boîtes, dont une sur laquelle était collée l’image imprimée de la noix de coco. Les noix de coco sont aussi des « boîtes » vides, à leur manière, ayant également été recyclées par la suite en une base pour des ampoules – exemple parmi d’autres d’un recyclage « en interne », chaque œuvre devenant susceptible de devenir le point de départ d’une autre, d’être réexploitée, en un tableau, ou un autre objet. Parmi les dernières réalisées, certaines ont pour étiquette une image d’une boîte scannée, le contenant devenant l’image du contenu.
Dans l’exposition Uncertain States of America (dans sa version londonienne), ces « boîtes à images » et les tableaux avaient été agencés sur des étagères en fer, du genre de celles qu’on peut trouver dans les grands magasins de bricolage. Claes Oldenburg a raconté la manière dont lui était venue l’idée de son Store – par la sensation (presque une illumination) que les magasins étaient comme des musées, exposant des marchandises commercialisables, et qu’il lui suffirait de reproduire ce type d’environnement pour faire une exposition de ses propres sculptures. Ici, le magasin ne fait plus dans le détail, plutôt dans le gros – et ce qui est proposé relève des fournitures pour artistes comme de la peinture, ou de la matière première comme des images arrachées à des magazines. Dans l’exposition à la galerie Air de Paris, une caisse utilisée pour le transport des œuvres avait été conservée dans l’espace d’exposition, devenant une partie intégrante de l’installation. L’exposition devient de cette manière l’image d’une réserve, ou plutôt une « allégorie réelle » du conditionnement de l’art. En ce sens, deux types d’espace se profilent dans les installations de Guyton\Walker, le magasin et l’atelier, formant une représentation allégorique du travail artistique. Allégorie réelle, au sens où pouvait l’être L’Atelier de Gustave Courbet, ou plus proche dans le temps Das Kapital Raum de Joseph Beuys, c’est-à-dire exposant les conditions de production de l’œuvre qui est donnée à voir[i]. Les ateliers d’artistes aujourd’hui, comme celui de Guyton\Walker, pourraient être comparés à certaines formes d’entreprises contemporaines, en ce sens que la production y est en partie externalisée, et qu’une autre partie de ce qui est fabriqué est achetée déjà transformée, et n’est plus de la matière première. Le magasin est devenu un prolongement normal de l’atelier. Warhol avait rebaptisé son atelier « usine », introduisant symboliquement la division industrielle du travail dans l’art. Les entreprises-modèles d’aujourd’hui ne sont plus des usines, elles s’occupent de services, et tendent à valoriser la « créativité » plutôt que la production en masse d’objets toujours identiques. Ce modèle créatif, c’est plutôt celui des agences de design ou des bureaux de style, avec un schéma de production collective emprunté aux industries culturelles, en fait. Le travail de Guyton\Walker étant lui-même en partie fondé sur la réutilisation d’images issues de l’univers de la publicité, leur collaboration est en soi une forme d’appropriation symbolique, celle du travail par association au sein d’une agence. À un bout de la chaîne, les pots de peinture neufs renvoient à une œuvre à venir, tandis qu’à l’autre bout les drapeaux – en fait les écrans de sérigraphie usagés ayant servi à réaliser les tableaux exposés – sont montés sur des manches comme des étendards, valant comme un rappel des moyens de production employés, mais aussi comme identification d’une « marque » de fabrique, en l’occurrence d’un « style » personnel. Les « étendards » sont des signes de ralliement ; dans leur travail, ils fonctionnent comme s’il s’agissait de rallier à soi un ensemble d’objets et d’images empruntées, en affirmant un titre de propriété sur le matériau récupéré.
L’« appropriation » ne suffit plus à définir une pratique artistique, dans la mesure où le procédé s’est largement répandu dans d’autres domaines. Il faut donc dire plus précisément ce qu’on entend par là : décrire le contexte particulier dans lequel intervient ce procédé, et s’interroger sur la nature de ce qui est approprié. C’est un des aspects les plus intéressants de leur travail que de requalifier cette pratique en la resituant dans la culture contemporaine. Entre les industries culturelles et la publicité d’un côté, et l’art de l’autre, les emprunts, sous forme d’allers-retours, se sont succédé à une vitesse accélérée ces dernières décennies. À tel point que les termes de « cooptation », de « récupération », de « détournement », paraissent des notions inadéquates – « circulation » conviendrait mieux, pour exprimer ce fait que, entre ces deux mondes, la boucle a été bouclée déjà plusieurs fois, comme dit Fabrice Stroun. L’appropriation dans l’art des années 1980 était pour l’essentiel une appropriation de l’iconographie du contenu des mass-media, tandis que l’appropriation contemporaine constitue une ré-appropriation d’un procédé qui est devenu entre-temps un gimmick publicitaire. Le terme même d’appropriation supposait l’originalité de la chose appropriée. Aujourd’hui, cette chose appropriée l’est déjà, elle est en fait recyclée. Le recyclage de formes auquel se livrent Guyton\Walker est en ce sens une appropriation au carré, en quelque sorte, venant non seulement après le travail d’autres artistes ayant utilisé ce procédé, mais encore après son adoption par l’univers du marketing. Les publicités qui servent de matériau à l’art, comme celui de Guyton\Walker sont aujourd’hui déjà en partie des emprunts à celui-ci.
C’est aussi la raison pour laquelle, comme toutes les choses qui circulent dans notre monde, qui a fait du recyclage l’un de ses premiers principes économiques, la valeur d’une œuvre semble être indexée sur sa valeur de récupération par les industries culturelles, entendue en un sens large (i.e. n’importe quel secteur économique fondé sur la « créativité »). Produire des objets suffisamment épuisés, tant formellement qu’au niveau du sens, est une manière de désamorcer cette circularité, paradoxalement, une manière de mettre en suspend le procédé lui-même, de l’arrêter. Si leur travail est bien une manière de mettre en suspend ce processus de circulation, il est aussi, du même coup, une façon de se démarquer de la tentation du spectaculaire, beaucoup d’artistes semblant rêver de reproduire l’échelle des superproductions du cinéma et dupliquer à leur niveau le gigantisme des produits de l’industrie culturelle. L’exposition à Harvard était intitulée Empire Strikes Back (2006). L’empire contre-attaque, mais lequel ? Là aussi, reste à savoir de quelle « boîte » ou de quel pot sort le titre. Est-ce celui du film de George Lucas ? Ou celui décrit par Antonio Negri & Michael Hardt dans leur livre Empire ? Publié sur place par les Harvard University Press (en 2000), cet essai est également un blockbuster dans son genre – un best-seller, relativement au tirage habituel de ce genre de livre. Empire Strikes Back (le film) est par ailleurs un sequel, une « suite ». Ce qui est une bonne image, aussi, de la façon dont la culture d’aujourd’hui, entendue en un sens large, prolonge ou recycle l’existant. Les sequels sont la forme contemporaine du maniérisme, et constituent sans doute une meilleure métaphore pour comprendre le régime de production des formes que tous les mots précédés des préfixes « néo- » et « post- ».
Bien que les deux œuvres ne soient pas de même nature, les deux Empire dont il est question ont quelque chose en commun, qui est de ne pas désigner à proprement parler une zone géographique, mais un type d’organisation sociale. L’Empire n’est pas un État ni une aire géographique – y compris dans le film de Lucas, où il est un principe de domination à l’extension indéfinie, sans limite. De même, l’espace de l’art n’est plus confiné par un cadre, et l’espace tangible (sa nature, sa perception) a cessé d’être un objet de spéculation pour les artistes. L’espace de l’art aujourd’hui coïncide avec l’espace médiatique, ou numérique. Et Empire Strikes Back pourrait également être entendu au sens de « Corporate culture strikes back » – une culture contre-attaquant en s’appropriant ce qui semblait la menacer, aussi modestement que ce soit, à savoir ces formes et ces procédures artistiques qui semblaient la défier en s’emparant de certains de ses traits. L’ironie du titre choisi pour l’exposition tient évidemment dans l’incommensurabilité des moyens mis en œuvre : superproduction d’un côté, barricade de pots de peinture empilés et quelques noix de coco de l’autre… Ironique aussi parce que les batailles de l’art sont des batailles pacifiques (c’est-à-dire symboliques), et que les artistes qui ne sont pas aspirés dans la spirale des surproductions à grand spectacle ne cherchent pas à rivaliser avec les ennemis qu’ils se désignent, mais à faire autre chose.
[i] Le titre original du tableau de Courbet est L’Atelier du peintre, Allégorie réelle déterminant une phase de sept années de ma vie artistique.
Guyton\Walker
By Vincent Pécoil
At first glance, the work of Guyton/Walker looks like a heterogeneous and chaotic jumble of things: jars of paint with labels that evoke family-size cans of fruit salad, paintings-more or less abstract, or perhaps reproducing advertisements-superimposed in anarchic compositions, plasterboard panels silkscreened with Op motifs, shelves, crates. The paintings themselves are accumulations of images taken from magazines and/or recovered from previous paintings. All of the images and motifs are recycled, passed from the world to art and vice versa-but also, in a seeming allegory for this circulation, shuffled between one medium and the next: the iron box, the painting, the silk screen. The images comprising each painting are successively (and in no particular order) torn, photocopied, scanned, overprinted, and screenprinted. Saturated and fattened through an accumulation of layers, these works seem ragged, on their last legs, as though lying in wait for the scrap heap-or at least trying to ward off any ideas for their future reuse. Layers of paint and ink are superimposed like Photoshop layers, one of the tools that has been used to create them. Ultimately, these paintings achieve a certain thickness, almost a « painterly » aspect. But we would need to employ a neologism-something like « computerly »-to describe this particular collection of traces, this record of sequential digital manipulations through tracing and layering, following the « Flatten Image » command.
Guyton/Walker’s use of these tools-both digital and traditional-reads like a succession of misuses and accidents. In drawing our attention to its own modes of production-its reliance on Photoshop, in this case-their art opposes what Wade Guyton qualifies as an « illusionist » instrumentation of that same tool-one that aims to erase its own traces, bowing to the virtues of high definition and smoothness. The scanners the artists employ seem straight out of Edwin Abbott Abbott’s Flatland. Scanned objects exceeding the perimeter of the glass pane of the flatbed-be it by only a centimeter-vanish into total darkness. And this is why the backgrounds of the resulting paintings are invariably black: because the artists always leave the lid of the scanner open, wary of crushing the fruit under observation, they have to forfeit the white backdrop on its underside. The scanner perceives the world as it is, but in two dimensions. The world beyond is a black room. Some of Guyton/Walker’s motifs seem to be defined by this absence of depth: pieces of fruit cut into rounds, the pages of a magazine. These slices of real are then definitively « flattened » on the surface of the painting. The knives that frequently appear in these arrangements of sliced fruit (pears, apples, bananas, kiwis, cocoanuts, lemons) suggest an analogy with another process of transformation (cooking), the scanner emerging as a kind of digital cutting board. Sometimes the scanned objects are too bulky for the machine-jars of paint, for example-and the images they produce come out blurred, like pieces of paper ripped prematurely out of a photocopier or printer. Originally, these jars served as props for paintings as they dried in Guyton and Walker’s studio. Their labels were glued on a posteriori, created from scanned images of sliced fruit, as though to emphasize their link to the cans of fruit in syrup they physically resemble. Such configurations often give us the impression that the contents of the can have given birth to the subject of the painting. The image promises us « content », and this promise is plausible in the sense that the paint inside the jars might actually have been used to realize these images of fruit. A painting of a coconut is suspended in the air by two cans, for example, one bearing the printed image of the same fruit. Elsewhere, the coconut reveals its own nature as an empty « can, » recycled in the form of a lightbulb fixture. And this is just one of many examples of Guyton/Walker’s « internal » recycling practice, where every work is likely to be regarded as the starting point for another, re-exploited in a painting or other object. Several of their most recent offerings are labeled with the scanned image of a can, the container providing an image of its content.
In their London installment for Uncertain States of America, these « image cans » and paintings are arranged on iron shelves, similar to those we might expect to see in a hardware store. Claes Oldenberg once said that he arrived at the idea for his Store through the sensation-almost an illumination-that stores were like museums-both display sellable merchandise-and that the former environment was sufficient for an exhibition of his own sculptures. Facing Guyton/Walker’s display, our impression of being in a store arises more in the broader strokes than in any particular detail; we encounter what resembles a depot of art supplies, chocked full of paint and other base materials, like images torn out of magazines. In their show at the Air de Paris gallery, a crate used for transporting works is left behind in the exhibition space, becoming an integral part of the installation. The exhibition becomes the image of a stockroom, or perhaps a « real allegory » for the packaging of art. Two types of spaces make an appearance in Guyton/Walker’s exhibitions-the store and the studio-forming an allegorical representation of artistic labor. The allegory is « real » in the way that Gustave Courbet’s L’Atelier1 once was, or, more recently, Joseph Beuy’s Das Kapital Raum; it exposes the conditions of production that brought the works we encounter into being. Today’s artist studios, like Guyton/Walker’s, resemble certain contemporary manufacturing enterprises; their production is partly externalized, and a large part of what they produce has already been transformed from its original state-that of its base material-by the time it is purchased. The store has become a natural extension of the studio. Warhol lovingly re-baptised his studio the « factory, » symbolically introducing the industrial division of labor in art. The model enterprises of today are no longer manufacturing plants; they provide services, and tend to favor « creativity » over the mass production of identical objects. This « creative » model derives from the universes of design and fashion and leans on the collective production schemes that originated in the cultural industries. Because Guyton/Walker’s work is partly founded on the reuse of images from the world of advertisement, their collaboration is a form of symbolic appropriation in itself-that of the phenomenon of joint labor under a single trademark. At one end of the production line, new jars of paint foreshadow a work to come; at the other, pieces of fabric-actually tattered silkscreens, used in the making of the exhibited paintings-hang like standards from atop poles. These banners are not only reminders of the modes of production in use, but also brand insignia-here, of a personal « style. » They are rallying signs that function by drawing an ensemble of borrowed objects and images around themselves, then affirming a stamp of ownership on the accumulated material.
« Appropriation » no longer suffices to describe an artistic practice when that practice extends largely into other domains. We have to elaborate further, describe the particular context in which appropriation arises, inquire into the nature of what is being appropriated. One of the most interesting aspects of Guyton/Walker’s work is their success in redefining this practice, which they achieve by inserting it within contemporary culture. The reciprocal appropriation by the cultural industries and advertising, on the one hand, and art, on the other, has greatly accelerated in recent decades-to the point that terms like « co-optation, » « recuperation, » and « détournenement, » no longer seem to apply, and we are forced to lean on words like « circulation » to explain the fact that, between these two worlds, the « loop » has already been « looped » a hundred times over, as Fabrice Stroun has argued. While the appropriation of the art of 1980s hinged primarily on the iconography of the mass media, the appropriation of today is a re-appropriation of a procedure that has since become a publicity gimmick. At its origin, the term « appropriation » presumed the originality of the appropriated object. Today, this object has already been appropriated, already been recycled. The recycling of forms in Guyton/Walker’s oeuvre represents, in this sense, an appropriation to the second power, one that stems not only from the work of previous artists who have used this procedure, but from its assimilation in the world of marketing. The advertisements that constitute Guyton/Walker’s working material, therefore, are already partly the hand-me-downs of art.
Like all of the things that circulate through our world-which, incidentally, has elevated recycling to one of its primary economic principles-the value of a work of art seems to hinge upon its potential for recuperation by the cultural industries, understood in the broadest sense as any economic sector founded on « creativity. » Producing objects that are wholly and utterly exhausted, both formally and on the level of meaning, is a manner of putting this process itself on hold, of stopping it. If their work represents an attempt to halt this process of circulation, it is also, at the same time, a means of distancing themselves from the temptations of the spectacular-unlike many other artists, who dream of a practice that reproduces the scale of the Hollywood blockbuster and replicates the gigantism of the products of the culture industry. Their exhibition at Harvard was entitled Empire Strikes Back (2006). The empire counter-attacks, but which one? From which « can, » which jar, did this title originate? Was it that of George Lucas’ film? Or the one described by Antonio Negri and Michael Hardt in their book by the same title? Published on site by Harvard University Press in 2000, Empire? is a kind of blockbuster in its own right, a best-seller when compared to typical sales statistics for books of its kind. Empire Strikes Back (the film), moreover, is a sequel, another appropriate image for the way the culture of today, defined in its largest sense, prolongs and recycles what exists. A contemporary incarnation of mannerism, the « sequel » is doubtless a better metaphor for the present-day production of forms than any word preceded by the prefixes « neo » or « post. »
Though they are clearly of a very different character, both « Empires » designate a type of social organization, rather than a physical territory. The Empire is neither a state nor a geographic area-even in Lucas’ film, where it is a principle of domination of infinite reach, without limit. Likewise, the space of art is no longer delimited by a frame, and physical space (its nature, its perception) has ceased being an object of speculation for artists.
Today, the space of art coincides with that of the mass media, that of the digital. And « Empire Strikes Back » can be just as easily understood in the sense of « Corporate Culture Strikes Back« –a culture counter-attracking by appropriating, either modestly or immodestly, that which once seemed to threaten it, the artistic forms and procedures that defied it by grasping hold of its own features. The irony of the artists’ chosen title lies in the incomparability of the means the exhibition puts into play: blockbuster on one side, barricade of paint jars and a few coconuts on the other. Ironic also because the battles of art are invariably pacific ones (that is to say, symbolic), and because the artists who are not swept up into the whirlwind of the spectacular are not looking to compete with their enemies, but to do something else.
1Courbet’s painting was originally entitled L’Atelier du peintre, Allégorie réelle déterminant une phase de sept années de ma vie artistique (« a painter’s studio: a real allegory of seven years of my life as an artist »)
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- Du même auteur : Bernard Frize,
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