Zoë Gray

par Raphael Brunel

Entretien avec Raphaël Brunel 

Pour leur quatrième édition, Les Ateliers de Rennes se présentent comme un « temps de récréation » qui interroge à travers un panel de pratiques artistiques des notions aussi ambivalentes et complexes que le travail et le jeu. Zoë Gray, commissaire de la manifestation, revient ici sur sa conception et des enjeux qui résonnent avec le contexte actuel tout en offrant un regard et une expérience résolument ludiques.

Pour commencer, pourriez-vous revenir sur la manière dont vous avez négocié cette question de l’économie qui constitue la spécificité des Ateliers de Rennes ?

À l’été 2013, j’ai été invitée à écrire un projet avec pour seules contraintes d’investir trois lieux prédéfinis (la Halle de la Courrouze, le Frac Bretagne et le musée des Beaux-Arts) et de répondre à cette thématique qu’est le croisement entre art et économie, qui relevait à mes yeux de la question du travail et de sa valeur. J’ai mené différents projets sur ce sujet ces dernières années[1] et je souhaitais prolonger cette réflexion en la remettant en perspective dans le contexte propre aux Ateliers de Rennes, sans négliger toutefois de déplacer ou d’en contourner les enjeux, comme le laisse suggérer le titre Play Time, emprunté au film de Jacques Tati, qui résume bien une proposition intégrant également les notions de paresse et non-travail.

Comment votre propos s’est-il déployé à partir de ces trois lieux ?

Le projet s’est constitué autour de trois angles d’attaque – chacun étant associé plus directement à un lieu – qui sont autant de manières de tourner autour d’un même sujet : le travail au Frac, le jeu à la Halle de la Courrouze et la paresse au musée. Cette répartition permettait de travailler sur différentes atmosphères tout en tenant compte des contraintes et des identités de ces lieux très typés.

L’enjeu était de proposer des expositions qui fonctionnent de manière autonome et pas uniquement comme un fragment isolé d’un ensemble plus vaste et indissociable, donnant ainsi le sentiment d’avoir vu quelque chose de pertinent et d’entier en ne visitant qu’un seul des espaces.

Vue de l'exposition L'aire de jeu à la Halle de la Courrouze © Aurélien Mole, pour PLAY TIME, 2014

Vue de l’exposition L’aire de jeu à la Halle de la Courrouze
© Aurélien Mole, pour PLAY TIME, 2014

On ressent toutefois une certaine porosité d’un lieu à l’autre qui permet de tisser un maillage d’ensemble cohérent. Cela semble accentué par la sélection d’artistes que l’on retrouve dans chacun des trois espaces. Au nombre impressionnant de noms, vous avez préféré la récurrence.

C’est une technique curatoriale que j’ai remarquée lors de la documenta 12 organisée par Roger M. Buergel en 2007. Elle donne la possibilité d’accéder au travail des artistes par plusieurs biais tout en permettant d’éviter l’écueil de l’œuvre convoquée comme illustration d’un propos. Quand c’était possible, j’ai essayé de présenter une pièce existante et une nouvelle production, afin d’offrir au public plusieurs portes d’entrée dans une pratique.

Dans la même logique, j’ai proposé aux lieux associés[2] de choisir dans ma sélection un artiste auquel ils souhaitaient consacrer un solo show. Le commissariat est assuré par chaque structure dans le cadre d’un projet spécifique qui résonne à la fois avec ma proposition mais aussi avec la programmation annuelle de chacune d’entre elles. Par exemple, l’exposition de Priscila Fernandes au centre culturel Phakt donne à la présentation de son travail une profondeur que je ne pouvais assurer dans le cadre d’une biennale. C’est également la première fois que l’événement sort de Rennes et intègre des institutions importantes de la région comme Le Quartier à Quimper et Passerelle à Brest.

Votre proposition pose une question complexe de définition : à partir de quand le travail, les loisirs ou la paresse commencent-ils ? Et où la création artistique se situe-t-elle par rapport à tout cela ?

Les choses se sont également constituées à partir d’une réflexion sur ma position de commissaire. Ces dix-huit derniers mois, riches d’une intense activité, j’étais partagée entre le fait de travailler si dur et de jouer. Comment réussir à parler de notre plaisir dans le travail sans le dévaloriser ? Jouer, c’est très péjoratif, qui plus est dans une société aussi obnubilée par la productivité. Cependant, il est indéniable que l’art a une valeur essentielle qui n’est pas directement marchande. En observant les artistes, je constate qu’ils sont toujours affairés. Cette culture du travail, le besoin d’être tout le temps occupé, est quelque chose qui a complètement infiltré le monde de l’art et, au-delà, la société en général. Il faut avoir un emploi pour avoir un statut social. Mais dans ce cas, qu’en est-il des gens qui ne travaillent pas ?

On parle beaucoup actuellement d’une austérité qui ne dit pas son nom et de la remise en cause d’un certain nombre d’acquis sociaux qui rend insidieusement le travail toujours plus impératif dans nos vies. Votre projet cherchait-il à entrer en résonance avec cette situation ?

Lorsque Paul Lafargue publia Le droit à la paresse en 1880, beaucoup d’intellectuels pensaient qu’au milieu du xxe siècle on ne travaillerait plus que quatre heures par jour. Or, au début du siècle suivant, le travail semble plus que jamais présent – certes d’une autre manière. J’essaie de soulever différentes questions critiques sans être trop illustrative mais sans être trop légère non plus. Il me paraissait intéressant de passer par un biais ludique pour aborder ces réflexions. C’est notamment pour cela que j’ai utilisé cette référence à Tati, car ses films sont des comédies qui posent, d’une manière très personnelle, un regard critique sur le monde et ses évolutions. C’est pour moi toute la richesse de l’art : des œuvres qui offrent plusieurs lectures tout en pouvant faire rire. Je pense à la vidéo d’Erik van Lieshout, présentée au Frac, dans laquelle il utilise le centre commercial comme métaphore de la société de consommation pour poser la question du rôle de l’artiste. Il a réalisé cette pièce à un moment très particulier aux Pays-Bas où la culture était dénigrée comme un « passe-temps de gauche ». J’ai trouvé cette idée de « passe-temps » captivante, car si on passe notre temps à l’occuper cela pose une question complexe de valeur et de sens.

À l’inverse, le monde de l’entreprise a commencé à incorporer le jeu, l’autonomie et la liberté des salariés comme modèle progressiste de fonctionnement et d’efficacité mais cela ne relève finalement que d’une forme de flexibilité déguisée.

C’est le sujet du film Work de Marianne Flotron. Son projet consistait à essayer d’intégrer un atelier du théâtre des opprimés[3] dans une société d’assurances prônant ouverture et liberté comme modes de travail. D’une certaine façon, le projet ne fonctionne pas, seul un employé accepte de participer, mais les discussions qui ont émergé sont révélatrices d’une pression invisible qui pousse les salariés à travailler toujours plus. Comme les films de Flotron et de van Lieshout, The Trainee de Pilvi Takala est exemplaire des idées développées dans Play Time. On y voit une stagiaire occuper ses huit heures de travail à ne rien faire, ce qui pose évidemment la question de la manière dont on est censé se comporter et de ce qu’on attend de nous. L’artiste explique que lors de sa réalisation il lui a été physiquement presque impossible de rester assise et inactive devant un bureau pendant huit heures, parce que la pression sociale et celle que l’on s’impose sont trop fortes.

Pilvi Takala The Trainee (2008) 2 vidéos HD, son, finnois, 6:20 & 7:18 min. Dispositif : meubles de bureau, lettre, clé électronique, écran, ordinateur, projecteur,  présentation Powerpoint, dimensions variables. Courtesy Artiste & Carlos/Ishikawa (Londres). © Pilvi Takala

Pilvi Takala, The Trainee (2008)
2 vidéos HD, son, finnois, 6:20 & 7:18 min. Meubles de bureau, lettre, clé électronique, écran, ordinateur, projecteur, présentation Powerpoint, dimensions variables.
Courtesy Pilvi Takala & Carlos/Ishikawa (Londres). © Pilvi Takala

Certaines œuvres témoignent par ailleurs de la nécessité de trouver des alternatives au surproductivisme. La paresse en est une mais on découvre également des logiques collaboratives, que ce soit dans le travail de Pilvi Takala qui demande à des enfants de réfléchir à la manière de dépenser son budget de production de sept mille livres, ou dans celui de Koki Tanaka qui consiste à expérimenter les stratégies permettant de s’entendre pour créer une céramique ou un morceau de piano à plusieurs.

Ce sont deux artistes plus intrigués par le processus que par le résultat. Si la logique n’est évidemment pas nouvelle, je trouve que cette stratégie consistant à éviter ou à contourner l’attente d’un objet final relève d’un véritable engagement. Les discussions qui animent ces projets témoignent du conditionnement de nos logiques de réflexion. Par exemple, dans The Committee de Pilvi Takala, si les enfants décident d’utiliser l’argent pour fabriquer un château gonflable plutôt que d’acheter quelque chose, l’idée de création est associée dans leur esprit à celle d’un produit ou d’une marque. Les enjeux liés à la démocratie et au collectif basculent alors dans l’établissement d’un plan marketing efficace pour développer leur petite affaire. Et pour des enfants qui ont entre dix et treize ans, réfléchir ainsi semble assez fou… Sur ces thématiques, il paraissait incontournable de présenter des pièces imprégnées par l’enfance, comme Freedom Requires Free People d’Ane Hjort Guttu qui suit un enfant de huit ans ne répondant pas aux comportements attendus.

Vouliez-vous nous replonger en enfance à la Halle de la Courrouze avec le GOGOLF échelle 1 de François Curlet qui a invité différents artistes afin de constituer un parcours de mini-golf ?

C’était l’occasion de réaliser ce très beau projet pour la première fois à une échelle praticable. Il y avait aussi l’idée de décomplexer le spectateur en conférant une dimension ludique à la visite, en lui donnant l’occasion d’expérimenter les choses et de devenir acteur de l’œuvre. Je vois l’ensemble du dispositif comme une sorte de jardin de sculptures et c’est vraiment sur cette frontière entre parc d’attractions et de sculptures, objet interactif et esthétique qu’il fonctionne. Le GOGOLF est l’une des rares pièces strictement interactives de la biennale. Les multiplier aurait surement constitué un écueil et je préférais, hormis quelques exceptions notables, présenter des œuvres qui proposent d’autres règles et façons de jouer, plus mentales.

Paradoxalement, le corps est très présent dans de nombreuses pièces, qu’il soit explicitement en jeu avec le GOGOLF, sujet ou vecteur dans des vidéos ou qu’il évoque un potentiel haptique à travers certaines sculptures.

Oui c’est vrai. Peut-être comme quelque chose de physique dans la paresse…

[1] « Manufacture » au Parc Saint-Léger (11 juin-4 septembre 2011) ou encore « Making is Thinking » au Witte de With (23 janvier-1er mai 2011) sur les croisements entre pratiques conceptuelles et artisanales, ainsi que l’organisation d’un symposium pour IKT sur la valeur du travail des commissaires d’exposition.

2 La Criée, Centre d’art contemporain ; 40mcube ; Phakt, Centre culturel Colombier ; Le Cabinet du livre d’artiste ; Le Quartier, Centre d’art contemporain (Quimper) ; Passerelle – Centre d’art contemporain (Brest)

3 Imaginé par le metteur en scène brésilien Augusto Boal dans les années 1960, le théâtre de l’opprimé est une forme de théâtre participatif et éducatif qui vise à soulever des questions de société dans le but faire prendre conscience de leur condition aux populations les plus exploitées.

Erik van Lieshout Commission (2011) Installation vidéo HD, son, néerlandais et anglais, 49 min. Commande de Scuplture International Rotterdam & Hart van Zuid, 2010-2011. Avec le soutien du Mondriaan Fund. © Aurélien Mole pour PLAY TIME, 2014

Erik van Lieshout, Commission (2011)
Installation vidéo HD, son, néerlandais et anglais, 49 min.
Commande de Scuplture International Rotterdam & Hart van Zuid, 2010-2011.
Avec le soutien du Mondriaan Fund. © Aurélien Mole pour PLAY TIME, 2014

Zoë Gray in conversation with Raphaël Brunel

The fourth Les Ateliers de Rennes art biennale is being presented as a “playtime” using a panel of art praxes to question notions as ambivalent and complex as work and play. As the biennale’s curator, Zoë Gray here discusses her conception and challenges which are in tune with the present-day context, while offering a determinedly playful experience and a larksome way of looking at things.

To start with, would you please tell us about the way you negotiated this economic issue which is the specific feature of Les Ateliers de Rennes?

In the summer of 2013, I was invited to write a project whose sole restrictions were that it should occupy three predefined venues (the Halle de la Courrouze, the FRAC Bretagne, and the Museum of Fine Arts), and respond to the theme represented by the crossroads between art and economy, which, in my eyes, stemmed from the issue of work and its value. I’ve undertaken different projects on this subject in the past few years1 and I wanted to extend this line of thinking by putting it in perspective in the specific context of Les Ateliers de Rennes, but without overlooking shifting or bypassing the challenges, as is suggested by the title Play Time, borrowed from Jacques Tati’s film, which neatly sums up a proposition which also includes the notions of idleness and non-work.

How was your idea developed based on these three venues?

The project is based around three angles of attack—each one being more directly associated with one place—which are as many ways of turning around one and the same project: work at the FRAC, play at the Halle de la Courrouze, and idleness at the museum. This distribution made it possible to work on different atmospheres while taking into account the restrictions and identities of these very distinctive places.

The challenge was to come up with exhibitions functioning in an autonomous way and not just as an isolated part of a larger and indissociable whole, thus giving a feeling of having seen something relevant and complete by visiting just one of the venues.

One nevertheless feels a certain porousness from one place to the next which makes it possible to create a coherent overall mesh. This seems to be accentuated by the selection of artists featured in each one of the three venues. You’ve preferred recurrence to an impressive number of names.

This is a curatorial technique that I noticed at Documenta 12, organized by Roger M. Buergel in 2007. It offers a chance to have access to artists’ work in several ways, while still sidestepping the pitfall of the work summoned to illustrate an idea. When possible, I’ve tried to present an existing piece and a new work, in order to offer the public several ways into a praxis. Using the same logic, I proposed to the associated places2 that they choose in my selection an artist to whom they wanted to devote a solo show. The curating is provided by each structure as part of a specific project which is attuned both with my proposal but also with the annual programme of each one of them. For example, the Priscilla Fernandes show at the Phakt Cultural Centre gives the presentation of her work a depth which I couldn’t guarantee in the framework of a biennale. This is also the first time that the event has moved outside of Rennes and incorporated major institutions in the region like Le Quartier in Quimper and Passerelle in Brest.

Vue de l’exposition Le droit à la paresse, Musée des beaux-arts de Rennes © Aurélien Mole pour PLAY TIME, 2014

Vue de l’exposition « Le droit à la paresse », Musée des beaux-arts de Rennes
© Aurélien Mole pour PLAY TIME, 2014

Your proposition raises a complex question of definition: when do work, leisure and idleness begin? And where is artistic creation situated in relation to all that?

Things also came about from a way of thinking about my position as curator. Over the past eighteen months, full of intense activity, I was split between the fact of working so hard, and playing. How can we talk about our pleasure derived from work without depreciating it? Playing is very derogatory, especially in a society that is so obsessed by productivity. It is nevertheless undeniable that art has an essential value which is not directly commercial. By watching artists, I note that they are all busy. This culture of work, the need to be doing something all the time, is something which has totally infiltrated the art world and society in general beyond it. People need to have a job in order to have a social status. But in this case, what about people who don’t work?

There is a lot of talk right now about a kind of austerity that dares not speak its name, and the questioning of a certain number of social facts which insidiously makes work ever more imperative in our lives. Was your project trying to be attuned to this situation?

When Paul Lafargue published The Right to be Lazy in 1880, lots of intellectuals thought that in the middle of the 20th century people would only work four hours a day. But at the beginning of the 21st century, work seems to be more present than ever—in another way, of course. I’m trying to raise different critical issues without being too illustrative, but without erring on the side of levity either. It seemed to me to be interesting to proceed by way of a playful path to broach these thoughts. This, in particular, is why I used the reference to Tati, because his films are comedies which, in a very personal way, cast a critical eye upon the world and its developments. This for me is the whole wealth of art: works which offer several readings while managing to make us laugh. I’m thinking of Erik van Lieshout’s video, screened at the FRAC, in which he uses the shopping mall as a metaphor of consumer society to raise the question of the role of the artist. He produced that work at a very precise moment in the Netherlands, when culture was being denigrated as a “leftwing pastime”. I found that “pastime” idea riveting, because if you spend your time occupying time, this raises a complex issue of value and meaning.

Conversely, the corporate world has started incorporating the playing, autonomy and freedom of employees as a progressive model of operation and effectiveness, but in the end this stems just from a form of disguised flexibility.

This is the subject of Marianne Flotron’s film Work. Her project involved trying to incorporate a theatre workshop for the oppressed3 in an insurance company advocating openness and freedom as work methods. In a way the project doesn’t work, just one employee agreed to take part, but the discussions which emerged reveal an invisible pressure which pushes employees to work more and more. Like the films of Flotron and Van Lieshout, Pilvi Takala’s The Trainee is a fine example of the ideas developed in Play Time. In it you see a trainee spending her eight working hours doing nothing, which obviously poses the question about the way in which one is meant to behave and what is expected of us. The artist explains that during the making of the film it was physically almost impossible for her to remain sitting down and inactive at a desk for eight hours, because social pressure and the pressure we impose on ourselves are too strong.

vue de l'exposition Ces salopards en casquettes venus se divertir et se reposer au bord de la mer au lieu de continuer à travailler à l’usine © Priscila Fernandes, Phakt Centre Culturel Colombier

Vue de l’exposition de Priscila Fernandes, « Ces salopards en casquettes venus se divertir et se reposer au bord de la mer au lieu de continuer à travailler à l’usine », Phakt, Rennes.
© Priscila Fernandes, Phakt Centre Culturel Colombier

Some works attest in addition to the need to find alternatives to over-productivism. Laziness is one alternative, but we also discover forms of collaborative logic, be it in Pilvi Takala’s work asking children to think about how to spend her 7,000 budget, or in Koki Tanaka’s work, which consists in experimenting with strategies making it possible for several people to agree to create a ceramic piece or a part of a piano.

Those two artists are more intrigued by process than results. The logic is obviously not new, but I find that this strategy consisting in avoiding or bypassing the expectation of a final object stems from a real commitment. The discussions about these projects illustrate our conditioned systems governing the logic of thinking. For example, in Pilvi Takala’s The Committee, if the children decide to use the money to make an inflatable castle rather than buy something, the idea of creation is associated in their minds with that of a product or a brand. The challenges associated with democracy and the collective thus topple over into the establishment of an effective marketing plan to develop their little business. And for children who are between ten and thirteen, thinking in this way seems quite crazy… With these themes, it seemed essential to present pieces imbued with childhood, like Ane Hjort Guttu’s Freedom Requires Free People, following an eight year old child who does not have expected patterns of behaviour.

Do you want to plunge us back into childhood at the Halle de la Courrouze with François Curlet’s GOGOLF échelle 1, where he invited different artists to make a mini-golf course?

It was an opportunity to produce that very beautiful project for the first time on a practicable scale. There was also the idea of reassuring the spectator by giving the visit a playful dimension, and giving visitors a chance to try things out and become a player involeved in the work, I see the whole arrangement as a sort of sculpture garden, and it’s really on that boundary between a theme park and a sculpture  park, as an interactive and aesthetic object, that it works. The GOGOLF is one of the strictly interactive pieces in the biennale. Having more such pieces would definitely have been a pitfall and, apart from a few notable exceptions, I was happier presenting works which propose other more mental rules and ways of playing.

Paradoxically, the body is very present in many pieces, be it explicitly with the GOGOLF, as a subject and vector in videos, or whether it evokes a haptic potential through certain sculptures.

Yes that’s true. Perhaps like something physical in laziness…

1 “Manufacture” in the Parc Saint-Léger (11 June-4 September 2011) and “Making is Thinking” at the Witte de With (23 January-1May 2011) at the crossroads between conceptual and artisanal praxes, as well as the organization of a symposium for IKT about the value of the work of exhibition curators.

2 La Criée, contemporary art centre ; 40mcube ; Phakt, Colombier cultural centre ; Le Cabinet du livre d’artiste ; Le Quartier, contemporary art centre (Quimper) ; Passerelle – contemporary art centre (Brest).

3 Devised by the Brazilian director Augusto Boal in the 1960s, the theatre of the oppressed is a form of participatory and educative theatre aimed at raising social issues with the purpose of increasing awareness among the most exploited people about their condition.